Inflation et développement durable

Publié le par verel

La mode pour le développement durable marque la volonté des européens de laisser à leurs (rares) enfants un territoire en bon état. Ce souci n’est pas compatible avec l’idée de certains de laisser filer l’inflation pour relancer la croissance et /ou régler la question de la dette publique.

Explications

Les taux d’intérêt marquent la préférence pour l’avenir. Un prêt d’un an à 5% signifie que le créancier préfère avoir 105 dans un an que 100 aujourd’hui alors que l’emprunteur fait le choix inverse.

Des taux élevés signifient que les créanciers n’acceptent de se priver de leur ressource pendant une certaine période que contre une forte rémunération alors que les emprunteurs préférent avoir la somme dans l’immédiat même au prix d’une somme nettement plus élevée dans l’avenir..

Pour les deux parties, l’avenir « vaut » moins que le présent, ils lui accordent moins d’importance.

Avec un taux d’intérêt de 3%, j’accorde à l’année N+1 une importance inférieure de 3% (en réalité 1 sur 1 + 0.03) à l’année N.

Un taux de 3% sur 5 ans conduit à accorder à l’année N+25 une importance deux fois plus faible qu’à l’année N.

On voit que ce taux d’intérêt bas conduit à une prise en compte forte de l’avenir. C’est pour cela qu’avec des taux d’intérêt bas, on peut faire des emprunts sur des durées longues, par exemple 30 ans.

A contrario, un taux d’intérêt élevé, comme les 17% qui ont prévalu un temps au début des années 1980, l’année N+25 ne vaut que un soixante dixième de l’année N soit environ 1.5%. On comprendra que ce qui peut s’y passer n’a guère d’importance ! A l’époque, emprunter à 10 ou 15 ans ne changeait pratiquement pas le niveau des mensualités (ce qui a conduit à inventer les crédits à remboursement progressif) . Il n’était pas possible d’emprunter plus de 6 fois la somme remboursée annuellement.

Si on ajoute l’ensemble des années N+1, N+2 etc., en tenant compte du taux d’intérêt, on peut mesurer combien « vaut » l’ensemble de l’avenir. Il vaut somme de 1 à l’infini de 1 sur (1 +t) à la puissance n, soit 1 sur t

Pour un taux annuel de 3%, l’avenir vaut donc environ 33 fois l’année en cours.

Pour le taux de 17% évoqué plus haut, l’avenir ne « vaut » plus que 6 fois l’année en cours.

L’avenir ne peut peser fortement dans les choix que s’il vaut de nombreuses fois l’année en cours, donc si les taux d’intérêt sont bas.

Or chacun comprend aisément ou a pu constater par le passé, que une forte inflation conduit à des taux élevés.

Ceux qui critiquent la lutte de la BCE contre l’inflation devrait savoir qu’ils proposent d’accorder moins d’importance à l’avenir (malgré pour certains le désir qu’ils en ont) et qu’ils vont donc à l’encontre des thèses du développement durable.

Publié dans Economie

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L
Moi, je dois avouer, j'avais pas toujours tout compris au développement durable, à le couche d'ozone, au biométhanol...Jusqu'à ce que je tombe sur www.thedino.org où ils publients une série de "leçons" sur l'effet de serre, l'énergie nucléaire, les 4X4...C'est assez marrant et surtout trés trés clair.Bisous,
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L
C'est une illusion de croire que l'inflation en elle-même est un facteur qui facilite le progrès économique. De nombreux faits historiques démontrent le contraire que cela soit en Amérique latine (Brésil, Argentine) ou Allemagne avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir. L'inflation est en fait surtout une aubaine pour les débiteurs (en particulier l'Etat) et une spoliation pour les créanciers qui se trouvent généralement pour la plupart dans un même pays.Pendant les "Trente Glorieuses", l'Allemagne Fédérale a su opérer une reconstruction et un développement supérieur à la France puisqu'elle partait de plus bas après la guerre, a dépassé la France et a réussi en grande partie à redresser l'Allemagne de l'Est et ceci sans inflation avec un mark fort qui a pratiquement triplé en 30 ans par rapport au franc !Depuis que le Brésil a su maîtriser son inflation, on assiste à son décollage économique.Il parait nécessaire de poursuivre un effort de pédagogie notamment vers les acteurs politiques, mettant en avant que l'inflation est non seulement un désordre injuste mais un facteur qui freine le développement.
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A
N'etes vous pas un peu trop sophistiqué? Non que ce que vous dites soit faux, il me semble que la raison de l'hostilité a la BCE releve plus d'un simple reflexe pavlovien. <br /> En France me semble t il l'augmentation des taux est vue comme prejudiciable aux interets des producteurs, regroupés en corporations vocales (syndicats, patronat), prejudiciable aux interets de l'Etat, fortement endetté, et limitant les capacités de cet Etat de faire des promesses de Gascon, pardon de delivrer des avancées sociales, qui seront vite reprises par l'inflation. <br /> Je suis un peu surpris qu'aucun parti ne fasse valoir l'interet des consommateurs, de maintenir la valeur de la monnaie, d'eviter l'expropriation, du patrimoine et des revenus non indexés, par l'inflation (c.a.d ceux des plus vulnerables). Il semble que les reflexes de annees 60 perdurent alors que les baby boomers deviennent sexagenaire. L'illusion de la jeunesse?
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