La méthode du soupçon

Publié le par verel

Stéphane Foucart, journaliste de la rubrique Planète a peut-être lu l’air de la calomnie dans le Barbier de Séville de Beaumarchais. En tous les cas, il semble s’en inspirer dans son dernier article, paru le 29 09, à propos de l’affaire Volkswagen où il s’attaque au CITEPA, dont manifestement les publications ne lui plaisent pas.

On savait que les écologistes radicaux n’aiment pas beaucoup les statistiques sur l’espérance de vie, dont la progression met à mal leurs discours apocalyptiques. On pouvait se douter que le CITEPA ne leur plait pas non plus. Cet organisme scientifique publie en effet depuis 1963 des statistiques de rejets de polluants, dont il faut noter que dans beaucoup de cas (pas tous) ils sont en baisse, parfois de beaucoup.

Or le CITEPA a été créé par les branches industrielles et a toujours dans son conseil d’administration des représentants de ces branches, et même horreur suprême, le Médef. Ce constat peut légitimement amener le citoyen à se poser des questions sur la qualité des travaux publiés et à la fiabilité des résultats. A cette question légitime, le CITEPA répond selon les normes scientifiques : il publie ses méthodes et est complétement transparent sur celles-ci. Ceux qui se posent des questions peuvent donc vérifier le bien-fondé de ces méthodes. C’est la manière dont fonctionnent notamment les grands constructeurs automobiles pour juger la qualité des fabrications de leurs fournisseurs, et ceux qui ont travaillé dans la sous-traitance automobile peuvent témoigner que les auditeurs qui viennent vérifier les procédures appliquées ne sont pas des rigolos.

J’ai d’ailleurs moi-même réagi de cette manière en écrivant il y a quelques jours au CITEPA pour lui demander si les résultats affichés étaient ou non remis en cause par l’affaire Volkswagen. La réponse est arrivée le jour même (voir plus bas).

Stéphane Foucart ne réagit pas comme cela, il juge la qualité des résultats sur le fait qu’ils lui conviennent ou non. Qu’une étude sur les OGM montre la nocivité de ceux-ci, contrairement à toutes les autres, il se félicite et refuse d’écouter les scientifiques qui font remarquer la non-conformité scientifique de la méthode utilisée.

Dans le cas du CITEAP, l’article du journaliste explique que les résultats affichés ne le satisfont pas. Il nte que le CITEPA se justifie d’un point de vue méthodologique. Plutôt que de s’aventurer sur ce terrain scientifique il préfère l’insinuation et conclure sur le fait que le CITEPA a été fondé par les industriels (il se trouve que je le savais déjà, cela ne m’a donc guère impressionné !), comme si c’est en soi une preuve de la fausseté des résultats !

Et c’est journaliste au Monde !

La réponse promise :

Bonjour M. Verel,

Je vous remercie de l'intérêt que vous portez au CITEPA. En effet, nous prévoyons de revenir sur le sujet du calcul des émissions "spécifiques ou unitaires" (c'est-à-dire ce qu'émet un véhicule individuel) dans le numéro de novembre de notre lettre d'information mensuelle « C'est dans l'air » réservée aux adhérents du CITEPA. L'article fournira des informations factuelles de base pour permettre au lecteur de comprendre le contexte et la méthodologie utilisée, en prenant du recul par rapport à l'actualité. Il s'agira notamment de préciser comment les véhicules sont homologués aujourd'hui dans l'UE (cycle d'essai NEDC qui devrait être remplacé en 2017 par le cycle WLTP). Je vous enverrai exceptionnellement le prochain numéro de C'est dans l'air pour que vous puissiez lire cet article.

Pour répondre à votre question, dans le cadre de la réalisation des inventaires nationaux, et plus particulièrement dans le cadre de l'estimation des émissions du transport routier, le CITEPA utilise la méthodologie de l'Agence Européenne pour l'Environnement (qui se base sur le modèle de calcul "COPERT"). Ce modèle permet, à partir de divers paramètres (type, motorisation, masse/cylindrée et norme du véhicule, vitesse moyenne, trafic sur les différents réseaux, taux de chargement des poids lourds, pourcentage de pente des réseaux, température, etc.) et de facteurs d'émission, de calculer les émissions des différents polluants émis par le trafic (que cela soit à la combustion, à l'évaporation ou liés à l'abrasion du revêtement routier et de différents organes du véhicules). Les facteurs d'émission de ce modèle sont issus de la recherche et ne sont pas les valeurs présentées dans différentes directives européennes relatives aux valeurs limites d'émission. Ces facteurs d'émission sont mesurés en laboratoire par différents instituts de recherche en Europe et sont validés par des publications scientifiques indépendantes. En général, ces facteurs d'émissions sont nettement plus importantes que les valeurs limites d'émissions des directives, et sont donc plus réalistes. En effet, plusieurs études (ICCT, JRC,...) soulignent le fait que les tests en laboratoire sous-estiment les émissions par rapport aux conditions réelles.

Pour de plus amples informations et précisions, veuillez-vous reporter à notre rapport OMINEA sur les méthodologies de comptabilisation des émissions de GES et de polluants atmosphériques dans les inventaires nationaux (http://www.citepa.org/fr/activites/inventaires-des-emissions/ominea). Ce rapport comporte une description du système national d'inventaires des émissions atmosphériques et de gaz à effet de serre, vis-à-vis de l'organisation, de la répartition des responsabilités et du champ couvert. Les dispositions techniques opérationnelles sont décrites et les éléments relatifs aux référentiels, au contrôle et à l'assurance qualité, à l'estimation des incertitudes. Voir surtout la section 1a3b p.497 du PDF. La mise à jour 2015 du rapport OMINEA est prévue d'ici fin 2015.

J’ai donc été voir la partie transport routier du rapport qui est trop longue pour que je la recopie ici. Elle comprend les sous chapitres suivants :

  • Correspondance dans différents référentiels
  • Approche méthodologique
  • Rang GIEC (3)
  • Principale sources utilisées
  • Présentation des catégories d’émission
  • Les données pour le calcul des émissions du transport routier
  • Les modèles de calcul
  • Le modèle Opale
  • Calcul du modèle statique pour les VUL
  • Calcul du parc statique pour les PL
  • Calcul du parc statique pour les deux roues
  • Le modèle COBERT

Etc., il y en a pour des dizaines de pages. On y trouve par exemple des graphiques donnant la composition du parc selon l’âge et donc les normes en usage

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P
À noter que S. Foucart se présente comme "journaliste scientifique" sur Twitter.<br /> <br /> <br /> Je n'avais jamais remarqué… Ses articles me maintiennent dans l'opinion qu'il est plutôt un éditorialiste militant!
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V
La méthodologie utilisée par le CITEPA est d'accès libre sur son site. Il est vrai que le document fait près de 1400 (mille quatre cents!) pages!) et qu'il faut avoir de bonnes raisons pour se le coltiner. Mais comme vous dites, Foucart est un militant, et donc je crois que l'argument 'ils dépendent des industriels" lui sufit pour décrédibiliser "l'ennemi"
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P
La méthode utilisée pas S. Foucart n'est pas très étonnante: c'est celle d'un militant. On ne saura jamais s'il a lui aussi contacté le CITEPA pour en savoir plus sur les méthodes utilisées pour les inventaires d'émissions. Même si je n'ai pas accès aux articles payants du Monde (il faut dire que je ne suis pas très incité à m'abonner par la prose de S. Foucart), je pense au vu de ce vous écrivez qu'il n'en fait pas état…<br /> <br /> Ça rejoint un peu les accusations de "conflit d'intérêts" lancées à tout bout de champ qui ne sont en fait que des accusations de corruption sans que le mot y figure. Les gens comme S. Foucart oublient quand même un peu vite qu'ils ont eux aussi des intérêts, mêmes s'ils ne sont pas financiers, mais politiques.<br /> <br /> Il reste qu'il est assez difficile de savoir s'il ne comprend pas la méthodologie du CITEPA ou si c'est seulement du militantisme.
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